Emplois à risque et violence domestique : les coûts sociaux « cachés » des actuels prix alimentaires élevés

Publié: 23rd mai 2013

Une nouvelle ère de prix alimentaires élevés et volatiles entraîne des changements susceptibles de transformer la société, d’après un rapport conjoint d’Oxfam et de l’Institute of Development Studies (IDS) publié aujourd’hui.

Le rapport, intitulé Sous pression, souligne les conséquences négatives sur les familles et les communautés de la hausse continue des prix alimentaires durant les cinq dernières années, alors que les salaires n’ont pas suivi : augmentation des cas de violence domestique, d’alcoolisme et de toxicomanie ; changements radicaux en termes d’emplois des personnes étant contraintes d’abandonner l’agriculture dus à l’éviction des personnes des champs et de se tourner vers des emplois plus risqués mais mieux payés notamment dans l’exploitation minière ou la prostitution ; et rupture de la vie communautaire due à la mise entre parenthèses des événements sociaux coûteux tels que les mariages. Le rapport révèle également que les personnes sautent des repas ou acquièrent des aliments peu coûteux, de moindre qualité et parfois contaminés pour joindre les deux bouts.

Sous pression est le premier de quatre rapports annuels qui examineront la façon dont les prix alimentaires élevés et volatiles affectent le bien-être des communautés urbaines et rurales de dix pays : la Bolivie, le Guatemala, le Bangladesh, le Pakistan, le Burkina Faso, l’Éthiopie, le Kenya, la Zambie, l’Indonésie et le Vietnam.

Les implications des prix alimentaires élevés et volatiles

Richard King, chercheur chez Oxfam, déclare :

« Les populations pauvres du monde entier vivent sous pression en cette ère de prix alimentaires élevés et volatiles. Cela va des infirmières en Zambie contraintes de travailler au noir en tant que vendeuses de rue pour joindre les deux bouts aux ménages à faibles ressources au Royaume-Uni qui empruntent de l’argent, puisent dans leurs économies ou ont recours aux banques alimentaires pour avoir suffisamment à manger. »

« Les implications des prix alimentaires élevés et volatiles vont bien au-delà des assiettes et produisent des changements sociaux qui doivent être mieux compris et abordés si l’on souhaite que les communautés s’en sortent indemnes. »

Les principaux constats de cette recherche sont les suivants :

  • La sécurité sanitaire des aliments est une préoccupation croissante, des familles étant contraintes de se tourner vers des aliments moins coûteux, de piètre qualité et parfois contaminés pour optimiser leur budget.
  • Les migrations augmentent, des personnes quittant leurs habitations en milieu rural pour rejoindre la ville ou d’autres pays, en quête de nouvelles opportunités économiques. En Éthiopie, les prix alimentaires sont mis en cause dans la vague d’émigration vers le Moyen-Orient.
  • Les tensions familiales sont mises en évidence, comme le montre la hausse des cas de violence domestique, d’alcoolisme et de toxicomanie, les hommes ayant du mal à remplir leur rôle traditionnel de « soutien de famille ».
  • Les profits imprévisibles et les coûts plus élevés signifient qu’une nouvelle génération d’agriculteurs se tourne vers des emplois plus risqués, notamment dans l’exploitation des mines d’or au Burkina Faso et la pêche dans la jungle au Bangladesh.
  • La vie communautaire disparaît étant donné que les familles réduisent les événements sociaux tels que les mariages et les enterrements afin de limiter les dépenses.
  • La pression sur le budget des familles implique que davantage de femmes entrent sur le marché du travail. Les grands-parents et filles aînées se voient contraints de s’occuper des enfants.
  • Des familles disent aussi sauter des repas, glaner de la nourriture ou produire leurs propres aliments. Au Bangladesh, certains se tournent vers des plats cuisinés en période de famine telles le « pantabhat », un plat à base de riz fermenté dans un bouillon.

Cette recherche innovante intervient alors que nous sommes dans une nouvelle ère de prix alimentaires élevés et volatiles, qui a débuté avec la crise alimentaire mondiale de 2007-2008. Les prix alimentaires restent extrêmement élevés et volatiles et ce sont les personnes les plus pauvres, qui dépensent plus de 80 % de leurs revenus dans l’alimentation, qui sont le plus fortement touchées.

Améliorer les politiques de protection sociale

Naomi Hossain, chercheuse universitaire à l’IDS, déclare :

« Au moment où les familles ont de plus en plus de mal à gagner suffisamment pour se nourrir, nous constatons que l’argent devient plus important que les relations sociales, au point où les répercussions sociales deviennent potentiellement inquiétantes. Les décideurs politiques doivent se mettre à la page. »

Cette étude recommande d’améliorer les politiques de protection sociale pour faire face à la vulnérabilité des plus pauvres, notamment par le biais de transferts d’argent ou d’aides. Une meilleure gestion des réserves alimentaires et de la régulation du marché international des céréales est également nécessaire, parallèlement à des actions pour valoriser les métiers agricoles en investissant dans la formation, la technologie et la durabilité. La nécessité de soutenir un nombre plus important de personnes chargées de la garde d’enfants, en particulier les grands-parents et les filles aînées, dont la santé et l’éducation peuvent être affectées, doit être reconnue.

En savoir plus

Téléchargez le rapport: Sous Pression: Vivre dans un contexte de volatilité des prix alimentaires – Principaux éléments et résultats de la première année de recherche

Les implications des prix alimentaires élevés et volatiles vont bien au-delà des assiettes.
Richard King
Chercheur chez Oxfam

Notes aux rédactions

Sous pression est le premier rapport issu de travaux de quatre années : Life in a Time of Food Price Volatility. Cette étude comprend un suivi des indicateurs relatifs à la sécurité alimentaire dans le monde, des visites annuelles dans 23 communautés rurales et urbaines, et une analyse des données d’enquêtes nationales, afin de donner une vue d’ensemble de la façon dont les personnes sont affectées dans plusieurs pays.

Des photos et des témoignages du Pakistan et du Kenya sont disponibles, ainsi que les graphiques apparaissant dans le rapport.

Informations sur les ménages au Royaume-Uni issues d’une enquête de l’association de consommateurs Which

L’Institute of Development Studies (IDS) est une organisation mondiale caritative leader dans les secteurs de la recherche, de l’enseignement et de la communication en matière de développement international. Notre vision est celle d’un monde dans lequel la pauvreté n’existe pas, la justice sociale prévaut et la croissance économique est orientée vers l’amélioration du bien-être des êtres humains. Nous croyons que le savoir issu de la recherche peut entraîner le changement qui doit s’opérer pour que cette vision se concrétise. Pour plus d’informations, consultez www.ids.ac.uk

Oxfam est une confédération internationale de 17 organisations qui travaillent ensemble pour trouver des solutions durables à la pauvreté et à l’injustice. Oxfam fait campagne en faveur d’une action visant à corriger notre système alimentaire défaillant par le biais de la campagne CULTIVONS.

Contact

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  • Anna Ratcliff, Oxfam, anna.ratcliff@oxfaminternational.org ou +447796993288
  • Carol Smithyes, IDS, +44 (0)1273 915638 ou c.smithyes@ids.ac.uk