Avis de gros temps sur les négociations de Paris 2015 sur le climat

Publié: 14th décembre 2014

Lima, Pérou - La multiplication des événements climatiques extrêmes continue de laisser de marbre les négociateurs de l’ONU sur le climat. L’accord trouvé sur des éléments annexes à Lima ne ferme pas la porte à un accord plus large à Paris mais il ne donne aucun signe que l’ambition nécessaire sera au rendez-vous.

« Les négociateurs ont évité le naufrage sur les côtes péruviennes, mais un avis de gros temps est annoncé sur la route de Paris climat 2015, affirme Winnie Byanyima, directrice générale d’Oxfam International. La faiblesse des résultats de Lima est un appel à continuer la mobilisation. Les gouvernements ne mettront pas en œuvre les solutions nécessaires sans que des voix ne se fassent entendre. La mobilisation doit redoubler en 2015 pour s’opposer aux intérêts particuliers qui profitent du statu quo. »

L’appel de Lima sur l’action climatique comprend un premier jet pour l’Accord de Paris qui ne règle néanmoins aucune des questions politiques sur la table depuis des années. De plus, il permet à tous les pays de déterminer leur propre niveau d’ambition sur les réductions d’émissions qui doivent être annoncées en 2015, indépendamment de leur responsabilité,  sans même prévoir de mécanisme pour évaluer si ces annonces sont adéquates et permettront d’éviter des dérèglements climatiques catastrophiques. Dans le même temps, rien de concret n’a été annoncé sur la nécessaire réduction des émissions à court terme.

Au-delà des $10 milliards annoncés pour le Fonds Vert pour le Climat à la veille du sommet, le texte ne propose que de vagues engagements à soutenir les populations sur la ligne de front du changement climatique. La prévisibilité des flux financiers à venir, nécessaire à la mise en œuvre des projets sur le terrain, reste totalement absente.

« Nous n'obtiendrons pas d'accord à Paris sans avancées décisives sur la question des financements et ce qui a été décidé à Lima est tout simplement insuffisant, affirme Winnie Byanyima. Les besoins sont considérables et la question des financements doit être un élément fort d'un paquet climat équilibré ».

Les pays riches peu enclins à faire des compromis

Aucun des plus gros émetteurs n’a réellement fait preuve de flexibilité et d’ambition. Les Etats-Unis et la Chine sont arrivés à Lima avec le vent en poupe, suite à leur récente annonce commune, mais ils ont montré trop peu de volonté de faire de véritables compromis à Lima sur la question des financements ou de la répartition des efforts à effectuer à l’avenir. L’Inde s’est opposée à ce que les engagements de réduction des émissions puissent être sérieusement évalués. L’Union européenne a de son côté préféré se reposer sur ses lauriers après ses récentes annonces sur le Fonds vert et la réduction des émissions à l’horizon 2030. L’Australie a elle fait acte de présence et c’est sans aucun doute sa principale contribution au processus.

L'attitude constructive de pays sud-américains

Le contraste est saisissant avec certains pays d’Amérique Latine, qui ont bien souvent montré une attitude constructive au-delà de ce que l’on pouvait attendre. La Colombie et le Pérou ont par exemple annoncé des contributions de $6 millions de dollars chacun au Fonds Vert malgré leur faible responsabilité historique. Le Groupe Africain a essayé de pousser pour davantage d’ambition mais n’a pu obtenir gain de cause. Les pays les plus vulnérables ont également dû se battre pour conserver une vague référence à la question essentielle des pertes et dommages dans le texte final.

Les paysannes que j'ai rencontrées cette semaine et les dizaines de milliers de personnes aux côtés desquelles j'ai marché ici, à Lima, demandent toutes que des mesures soient prises avant qu'il soit trop tard, souligne Winnie Byanyima. Les citoyens ordinaires et les communautés les plus touchées sont fatiguées des discours convenus et des gouvernements, patrons  et bureaucrates qui passent leur temps à se chercher des excuses. »

Le coût énorme de l'inaction

Le résultat de Lima ne nous éloigne pas d’une trajectoire d’augmentation de la température d'au moins 3 degrés. A ce niveau, le coût de l’inaction est énorme en termes de vies humaines, d’augmentation de la pauvreté ou de menaces sur la sécurité alimentaire.

« Nous attendions un changement de cap à Lima mais les négociateurs ont préféré continuer d’avancer vers l’œil du cyclone, déplore Winnie Byanyima. En 2014, un demi-million de personnes sont descendues dans les rues pour exiger des actes face au changement climatique, tandis que la plus grande marche sur le climat jamais organisée en Amérique latine a eu lieu cette semaine. Il faudra donc faire encore davantage avant les négociations de Paris. Mais même tout se passe au mieux en 2015, il faudra faire preuve de vigilance pendant plusieurs décennies. Nous l'avons vu cette semaine : même dans l’hypothèse optimiste que l’accord le plus ambitieux encore sur la table soit signé à Paris, notre travail sera loin d'être terminé. »

Nous n'obtiendrons pas d'accord à Paris sans avancées décisives sur la question des financements et ce qui a été décidé à Lima est tout simplement insuffisant.
Winnie Byanyima
Directrice générale d'Oxfam International

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