Toutes les inégalités ne sont pas visibles : la véritable valeur du travail de soin

Women and girls work incredibly hard to care for others. Not only is this work unpaid, but it's often not seen as real work at all. If we valued care work the same as other work, it would be worth nearly $11 trillion US dollars a year. But it's true value is much greater, as it is central to human and social wellbeing. To fight inequality and beat poverty, we must make care count.

Les femmes et filles travaillent très dur pour s'occuper des autres. Ces tâches ne sont pourtant ni rémunérées ni considérées comme essentielles. Si le travail de soin était considéré comme un travail à part entière, il génèrerait près de 11 000 milliards de dollars par an. Mais sa valeur est en fait bien plus grande.

Lorsque nous réfléchissons au fossé entre les hommes et les femmes, nos esprits pensent directement à des concepts comme les enveloppes salariales et le plafond de verre. Pour les femmes et les filles, cet écart est mieux représenté par les heures de marche quotidiennes qu’elles sont obligées de réaliser pour aller chercher de l'eau, se mettant ainsi souvent en danger, ou encore par les heures interminables passées à s’occuper d’autres personnes, à cuisiner et à faire le ménage. Toutes ces tâches invisibles leur sont habituellement assignées, mais elles ne sont ni appréciées à leur juste valeur, ni considérées comme un véritable travail.

Le travail de soin est le moteur caché qui fait tourner nos économies, nos entreprises et nos sociétés. Ce travail est principalement réalisé par des femmes et les filles qui manquent souvent de temps pour s’instruire, gagner un salaire décent, s’impliquer dans la vie communautaire ou participer à la gestion de la société, et qui sont piégées au bas de l'échelle économique. 

28 year old Edna washes dishes outside her home in Masvingo District, Zimbabwe.

Edna, 28 ans, fait la vaisselle devant sa maison dans le quartier de Masvingo, au Zimbabwe. Les femmes sont traditionnellement responsables des tâches domestiques comme le ménage, la lessive ou la collecte d'eau pour répondre aux besoins essentiels du foyer. Photo: Aurelie Marrier D'Unienville/Oxfam

Le secteur le plus important au monde

Le travail de soin est essentiel au bien-être humain et à la vie sociale. Il regroupe des tâches diverses, de la garde d’enfants à l’accompagnement des personnes âgées et des personnes en situation de handicap ou atteintes d’une maladie physique ou mentale, en passant par tout un éventail de tâches domestiques quotidiennes (cuisine, ménage, lessive, raccommodage, collecte d’eau et de bois de chauffage). 

Si personne n’investissait du temps, des efforts et des ressources dans ces tâches quotidiennes essentielles, les communautés, les entreprises et des pans entiers de l’économie seraient paralysés. 

Dans le monde entier, le travail de soin pèse de façon disproportionnée sur les femmes et les filles, et en particulier sur les femmes pauvres et appartenant à des groupes marginalisés. En plus d’effectuer gratuitement le travail de soin dans leur foyer, beaucoup d’entre elles travaillent également au service d’autres personnes, par exemple en tant que travailleuses domestiques, l’un des secteurs où la main-d’œuvre est la plus exploitée dans le monde.

Une responsabilité lourde et inégale 

Les femmes et les filles réalisent plus des trois quarts du travail de soin non rémunéré dans le monde et représentent deux tiers de la main-d’œuvre assurant un travail de soin rémunéré.  

Elles effectuent 12,5 milliards d’heures de travail de soin non rémunéré par jour. Nous estimons qu’à un salaire minimum, cela représenterait une contribution à l’économie mondiale d’au moins 10 800 milliards de dollars par an, soit plus de trois fois la valeur du secteur mondial de la technologie.

Dans les pays à bas revenus, les femmes en milieu rural passent jusqu’à 14 heures par jour à effectuer des tâches de soin non rémunérées.

Dans le monde, 42 % des femmes ne peuvent accéder à un emploi rémunéré du fait de leurs responsabilités en matière de travail de soin non rémunéré, contre 6 % des hommes.

Au total, 80 % des 67 millions de travailleurs et travailleuses domestiques du monde entier sont des femmes : 90 % d’entre elles n’ont pas accès à la sécurité sociale et pour plus de la moitié, la législation nationale ne prévoit aucune limite d’heures de travail.

Ignoré, sous-évalué : un travail invisible

Alors même qu’il est le socle sur lequel repose une société prospère, le travail de soin peu ou non rémunéré est fondamentalement invisible. Il est très largement sous-évalué et tenu pour acquis par les gouvernements et les entreprises. Il n’est souvent pas considéré comme un véritable travail, et les sommes qui y sont consacrées sont traitées comme un coût et non un investissement.

Il fragilise la santé et le bien-être des femmes et des filles et entrave leur prospérité économique en alimentant les disparités entre les femmes et les hommes en matière d’emplois et de salaires. Il les prive également de temps, ce qui les empêche de répondre à leurs besoins essentiels et de participer à des activités politiques et sociales. 

Le travail de soin peu ou non rémunéré perpétue les inégalités de genre et économiques. Il participe à un système économique sexiste qui a concentré des richesses et des pouvoirs considérables entre les mains d’une élite fortunée, notamment en exploitant le travail des filles et des femmes et en violant leurs droits de façon systématique.

Rowena, day-care worker, mother and housewife, Philippines

Rowena est employée de garderie dans une école, aux Philippines, et s’occupe aussi de son foyer. Avant de participer à des formations et à des séminaires donnés par Oxfam et le programme WE-Care d’Unilever, elle et son mari n'avaient jamais remis en question les longues heures qu'elle passait à collecter de l'eau, cuisiner, faire le ménage et d'autres tâches domestiques en plus de son travail.

Faire passer le travail de soin et le bien-être avant les profits et la richesse

Les femmes du monde entier, et en particulier les plus pauvres, apportent une contribution colossale à l’économie et à la société grâce à leur travail de soin essentiel. Pourtant, notre système économique défaillant valorise davantage la richesse d’une minorité privilégiée, constituée d’hommes principalement, que les milliards d’heures de travail non rémunéré que les femmes et les filles effectuent chaque jour, et bien davantage encore pour des salaires de misère.

Les gouvernements doivent considérer que le travail de soin est tout aussi important que celui des autres secteurs, afin de construire des économies centrées sur l’humain qui profitent à toutes et tous, et pas seulement à quelques personnes privilégiées.

Ils doivent veiller à ce que les sociétés et les particuliers les plus fortunés s’acquittent de leur juste part d’impôts et investir ces fonds dans les services publics et les infrastructures, ce qui ferait gagner du temps aux femmes et leur permettrait de prendre part à des activités en dehors du foyer, pour leur donner une chance de se libérer du piège de la pauvreté.

Soutenons celles qui comptent