Afghanistan : tenir les femmes à l’écart du processus de paix risque d’entraîner un recul de leurs droits acquis depuis la chute des talibans

Publié: 24th novembre 2014

En Afghanistan, les femmes sont systématiquement exclues des négociations de paix et autres discussions officielles sur l’avenir du pays. Il faut remédier à cette discrimination, sinon la paix ne pourra pas s’inscrire dans la durée, le développement de l’Afghanistan sera compromis, et la menace d’un recul continuera de peser sur les considérables avancées des droits humains accomplies depuis la chute du régime taliban en 2001.

Dans un rapport publié aujourd’hui, « Sans consultations », Oxfam évalue 23 négociations de paix qui ont eu lieu entre les talibans, le gouvernement afghan et la communauté internationale depuis 2005. Résultat : pas une seule Afghane n’a été associée aux négociations entre la communauté internationale et les talibans, et une présence féminine n’est relevée qu’à deux occasions au cours des négociations entre le gouvernement afghan et les talibans.

En tenant les femmes à l’écart du processus de paix et de développement, les alliés occidentaux de l’Afghanistan rompent leur promesse faite il y a treize ans de favoriser l’autonomisation des femmes. Oxfam estime que, si l’on ne donne pas un rôle actif aux Afghanes, la guerre aboutira finalement au confinement des femmes dans la pauvreté, ce qui compromettrait directement la prospérité future du pays.

Les femmes servent aujourd’hui encore de monnaie d’échange dans le règlement de litiges entre familles. Elles ont rarement subi autant de violences dans le pays. Les lois destinées à protéger leurs droits sont menacées, et le quota de femmes au parlement a été revu à la baisse.

Promesses non tenues

« La communauté internationale a utilisé les droits des femmes pour justifier sa présence en Afghanistan, estime John Watt, directeur pays d’Oxfam en Afghanistan. Après les améliorations apportées et l’investissement de plus de 100 milliards de dollars d’aide, un recul des progrès serait tragique. À l’heure où les donateurs s’empressent de plier bagage, la population afghane ne devrait pas craindre que la communauté internationale oublie les promesses faites aux femmes afghanes et permette une renégociation de leurs droits. »

Une relance des pourparlers de paix semble s’amorcer sous le nouveau gouvernement afghan, mais Oxfam craint qu’aucun accord de paix durable ne soit possible si l’on refuse aux femmes une place à la table des négociations.

« Avec l’aide internationale, nombre d’Afghanes ont indubitablement apporté des changements considérables dans leur vie au cours des dix dernières années. Elles ont accès à des professions telles que médecin, chef de police, parlementaire ou enseignante. Un nombre record de filles sont scolarisées. Mais des millions d’autres femmes dans les zones rurales et plus isolées du pays n’ont pas connu de changement. Dans certains cas, il y a eu un recul des droits qu’elles avaient pu acquérir, affirme John Watt.

« Tant dans les villages où nous travaillons que dans les plus hautes instances de l’État, nous constatons la fragilité des droits des femmes. Avec de nouvelles négociations de paix en perspective, il est temps que le gouvernement afghan et ses alliés occidentaux prônent de nouveau un rôle moteur pour les femmes dans l’avenir du pays. Ils ne peuvent pas leur faire faux bond et décider de leur avenir sans les consulter. »

Tant dans les villages où nous travaillons que dans les plus hautes instances de l’État, nous constatons la fragilité des droits des femmes.
John Watt
Directeur pays d’Oxfam en Afghanistan

Notes aux rédactions

Contexte

Oxfam a commencé à soutenir des projets en Afghanistan en 1964 et y apporte une aide humanitaire et au développement directe depuis 1991. L’organisation a donc également été active dans le pays sous le régime taliban. En 2010-2011, par son travail humanitaire, de développement, d’orientation politique et de plaidoyer, Oxfam a aidé 300 000 personnes à surmonter les difficultés rencontrées dans leur vie quotidienne : manger à sa faim, envoyer les enfants à l’école et faire face aux violences armées et aux catastrophes naturelles. Active dans sept provinces, Oxfam agit directement dans deux d’entre elles où l’organisation a du personnel sur place et par le biais de ses partenaires dans les cinq autres. Nous nous employons à aider la population à s’assurer des moyens de subsistance solides et durables, à réduire l’impact des crises et des catastrophes naturelles et à permettre l’autonomisation sociale et économique des femmes et des filles.

Plus de dix ans après la chute du régime taliban, l’Afghanistan reste l’un des pays les plus pauvres du monde. Malgré les progrès accomplis, près de 40 % de la population continue de vivre dans l’extrême pauvreté, un enfant afghan sur cinq meure avant ses cinq ans, et l’Afghanistan affiche l’un des taux de mortalité maternelle les plus élevés au monde. Souvent, les administrations sont déficientes et ne peuvent pas assurer des services de base. La participation des femmes à la vie publique demeure limitée, et l’Afghanistan reste l’un des pays les plus dangereux pour les femmes

Pour plus d'information, consulter le rapport complet « Sans consultations »

 

Contact

Roslyn Boatman, Chargée de relations presse d’Oxfam (Kaboul)

+93 (0) 796 738 402 roslyn.boatman@oxfamnovib.nl