L’investissement d’un milliard de dollars dans le secteur privé de la santé en Afrique oublie les populations pauvres

Publié: 9th septembre 2014

L’initiative du groupe Banque mondiale ne tient pas ses promesses

Un programme phare qui mobilise un milliard de dollars pour soutenir le secteur privé de la santé en Afrique oublie les populations pauvres pour se concentrer sur les hôpitaux haut de gamme en milieu urbain, bénéficiant principalement aux couches aisées de la population.

Selon Oxfam, l’initiative « Santé en Afrique », menée par la Société financière internationale (SFI ou IFC en anglais), la filiale du groupe Banque mondiale investissant dans le secteur privé, s’inscrit en porte-à-faux avec l’engagement public de la Banque mondiale de promouvoir un accès universel et équitable à la santé.

« L’initiative Santé en Afrique ne contribue pas à réduire l’écart entre les riches et les pauvres en matière de soins de santé. L’IFC ne peut pas démontrer que ce programme profite aux populations pauvres », dénonce Nicolas Mombrial, le porte-parole d’Oxfam.

Lancée en 2008, l’initiative Santé en Afrique bénéficie du soutien de la France, du Japon et des Pays-Bas, ainsi que de la Fondation Bill et Melinda Gates, parmi d’autres. Elle vise à encourager les investissements du secteur privé dans la santé sur le continent africain, l’accent étant mis sur les populations dites « mal desservies ».

Toutefois, il ressort d’une récente étude indépendante et d’une analyse d’Oxfam que cette initiative ne respecte pas ses engagements en faveur des populations mal desservies et n’évalue même pas si les populations pauvres en bénéficient.

Au contraire, Oxfam a établi que nombre des investissements engagés ont financé des établissements hospitaliers onéreux en milieu urbain, souvent explicitement destinés aux citoyennes et citoyens les plus aisés. Par exemple, au Tchad, la clinique La Providence devait recevoir un prêt de 1,5 million de dollars afin de dispenser des services de santé pour lesquels les Tchadien-ne-s se rendent habituellement à l’étranger.

Au Nigeria, où se concentre 14 % de la mortalité maternelle mondiale, 5 millions de dollars ont été investis dans la première clinique africaine de fécondation in vitro (FIV), où un cycle de FIV coûte 4 600 dollars.

Le plus gros investissement – d’un montant de 93 millions – a bénéficié à Life Healthcare, le deuxième plus grand prestataire privé de services de santé en Afrique du Sud, qui possède 63 hôpitaux. Les services de Life Healthcare ne sont pas à la portée des ménages sud-africains même relativement aisés ; l’assurance maladie n’en couvre qu’une petite partie et seulement 15 % de la population sud-africaine possède une assurance maladie.

« L’Afrique ne devrait pas être un laboratoire où l’IFC s’autorise à mener des expériences hasardeuses » souligne Nicolas Mombrial.

« Les pays qui ont le plus progressé vers une couverture de santé universelle ont principalement misé sur les systèmes publics. Le Groupe de la Banque mondiale devrait plutôt soutenir ces solutions qui ont fait leurs preuves et aider les États à développer leur système de santé public. »

Oxfam réclame que l’IFC interrompe l’initiative Santé en Afrique jusqu’à ce qu’elle puisse assurer que ses investissements sont favorables aux populations pauvres. Le Groupe de la Banque mondiale doit examiner toutes les opérations de l’IFC dans le secteur privé de la santé pour s’assurer de leur conformité avec les objectifs de la banque de mettre fin à l’extrême pauvreté, de promouvoir une prospérité partagée et de contribuer à une couverture de santé universelle.

« L’initiative Santé en Afrique ne contribue pas à réduire l’écart entre les riches et les pauvres en matière de soins de santé. L’IFC ne peut pas démontrer que ce programme profite aux populations pauvres. »
Nicolas Mombrial
Porte-parole d’Oxfam

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