La désintégration de la zone euro coûterait 30 milliards de dollars aux pays les plus pauvres

Publié: 14th juin 2012

Pour Oxfam, le G20 ne doit pas laisser la crise de l’euro torpiller les efforts de développement

Alors que les dirigeants du G20 se retrouvent au Mexique pour discuter de l’état de l’économie mondiale, l’organisation internationale Oxfam prévient qu’une désintégration de la zone euro pourrait coûter 30 milliards de dollars en perte de revenus commerciaux et d’investissements étrangers aux pays les plus pauvres du monde.

De nombreux pays pauvres tomberaient dans un cercle vicieux ou une « spirale de baisse » des recettes d’exportation, qui endommagerait leurs économies et accentuerait la pression sur des ressources, déjà limitées, allouées à des services essentiels de santé et d’éducation. 30 milliards de dollars, soit près d’un quart du budget de l’aide mondiale, représente un fardeau supplémentaire pour les pays pauvres alors que la menace d’une crise alimentaire imminente plane sur 18 millions de personnes en Afrique de l’Ouest. Les donateurs n’ont pas dégagé, jusqu’à présent, les fonds nécessaires pour aider les personnes exposées à la faim.

Selon les calculs d’Oxfam, si l’euro s’écroule, la chute du PIB des pays européens, entraînerait dans l’année qui suit un manque à gagner pour les pays les moins avancés – surtout ceux d’Afrique sub-saharienne – de 20 milliards de dollars suite à une baisse de leurs exportations vers l’Europe. Les pays pauvres pourraient perdre 10 autres milliards en raison de la réduction des investissements en provenance du vieux continent. Un effondrement de la zone euro ne ferait qu’aggraver les problèmes auxquels sont déjà confrontés les pays à faible revenu : pénuries alimentaires, amputation de l’aide et réduction des flux de capitaux en conséquence de la crise économique.

Pour une taxe sur les transactions financières

Oxfam appelle le G20 à soutenir une taxe sur les transactions financières (TTF, connue dans de nombreux pays sous le nom de taxe Robin des bois) destinée à aider les populations pauvres touchées par la crise économique et dont les recettes seraient allouées au développement et à l’adaptation au changement climatique. La Commission européenne a proposé une TTF à l’échelle de l’UE, qui générerait 71 milliards de dollars [57 milliards d’euros] par an. Le G20 doit également prendre des mesures urgentes pour freiner la spéculation financière sur les denrées alimentaires, supprimer les politiques en matière d’agrocarburants qui transforment des denrées alimentaires en carburant et améliorer les droits fonciers.

Pour Steve Price-Thomas, porte-parole d’Oxfam : « La crise de l’euro est une grave menace pour les pays pauvres déjà ébranlés par la crise alimentaire et la réduction de l’aide. Les dirigeants du G20 ont l’obligation de protéger ceux qui ont atteint les limites de leur capacité à se défendre contre la crise.

« Nous avons besoin d’un effort concerté pour protéger les populations pauvres contre les crises économiques et alimentaires qui font qu’une personne sur sept dans le monde souffre de la faim. Le secteur financier devrait opérer dans les intérêts de la société et non l’inverse : cela signifie que nous devons freiner la spéculation alimentaire et inciter le secteur, qui porte la responsabilité de la crise économique, à aider les populations pauvres qui y paient un lourd tribut. »

Les flux de capitaux vers les pays en développement ont chuté

Il y a trois ans, le G20 a lancé un programme pour « une croissance forte, durable et équilibrée ». Ses dirigeants se réuniront à Los Cabos en ayant fait peu pour les populations les plus exposées aux risques de perdre leurs moyens de subsistance et de basculer dans la pauvreté.

L’an dernier, le volume brut des flux de capitaux vers les pays en développement a plongé pour s’établir à 170 milliards de dollars, contre 309 milliards en 2010, tandis que l’aide aux pays en développement diminuait de 3,4 milliards de dollars.

Steve Price-Thomas ajoute : « Les dirigeants du G20 doivent user de leur pouvoir pour résoudre la crise dans le monde au-delà de l’Europe. Le faire ou non, c’est un choix politique. »

Oxfam appelle le G20 à :

  • Prendre des mesures pour réformer le système alimentaire défaillant. Le G20 s’obstine à ne pas combattre les principales causes de la crise des prix alimentaires : hausse de la demande en agrocarburants, spéculation financière sur les produits de base et changement climatique. L’enjeu le plus pressant est la grave pénurie alimentaire à laquelle 18 millions de personnes se trouvent actuellement confrontées au Sahel. Ce nombre s’ajoute au quasi-milliard de personnes dans le monde qui souffrent déjà de la faim, tous laissés-pour-compte d’un système alimentaire défaillant.
  • Lutter contre l’évasion fiscale et encourager la transparence. Chaque année, les pays en développement perdent des milliards qui auraient pu contribuer significativement à stimuler leur économie et à réduire la pauvreté. Jusqu’à présent, la promesse du G20 de sévir contre les paradis fiscaux ne s’est guère concrétisée.
  • Mobiliser des fonds pour accroître les dépenses publiques et pour renforcer le soutien aux plus démunis par l’instauration d’un système de prix du carbone dans le secteur du transport maritime international qui permettrait de réduire les émissions de carbone et de récolter 25 milliards de dollars par an.
  • S’attacher à assurer une croissance équitable et propre à renforcer l’égalité, afin que ses bienfaits profitent aux personnes vivant dans la pauvreté. Pour commencer, les pays du G20 devront absolument publier des rapports annuels sur les progrès accomplis dans la réduction des inégalités et adopter celle-ci comme indicateur de progrès au même titre que la croissance du PIB. Ils devront également engager le FMI à en faire autant.
  • Favoriser une augmentation des investissements dans des services publics de santé et d’éducation de qualité. Ces services constituent un filet de sécurité pour les plus démunis et les personnes vivant dans la misère. Il s’agit en outre d’investir dans la productivité future et dans une société plus juste.
La crise de l’euro est une grave menace pour les pays pauvres déjà ébranlés par la crise alimentaire et la réduction de l’aide.
Steve Price-Thomas
Oxfam

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