Politiques des industries extractives en matière de consentement communautaire : un constat mitigé

Publié: 23rd juillet 2015

L’application du principe du « consentement libre, préalable et éclairé » pourrait éviter des conflits coûteux pour les entreprises.

Selon l’étude « Indice 2015 de consentement communautaire » publiée aujourd’hui par Oxfam, face aux problèmes que les conflits avec les communautés locales posent aux entreprises pétrolières, gazières et minières à travers le monde, le nombre de compagnies minières qui s’engageant s’engagent à appliquer le principe du « consentement libre, préalable et éclairé (CLPE) » a presque triplé depuis 2012. Bien que positive, cette tendance masque des faiblesses concernant la protection des droits des communautés et des peuples autochtones vivant à proximité de projets de grande envergure. 

Dans le cadre de cette étude, l’organisation internationale de développement, Oxfam a examiné les politiques de 38 entreprises des secteurs minier, pétrolier et gazier, dont ExxonMobil, Chevron, Shell, Anglo American, CNOOC, Petrobras, BHP Billiton, Rio Tinto, Total, Vale, et BG Group, en matière de respect des droits des communautés locales et de dialogue avec celles-ci. Il en ressort que les entreprises de l’industrie extractive font de plus en plus souvent le constat de la pertinence du CPLE dans le cadre de leurs opérations. Cependant, le secteur du pétrole et du gaz est à la traîne et les entreprises ont en général du mal à mettre en œuvre un principe pourtant clairement défini par les institutions internationales et le droit international. 

« Le risque de répercussions négatives sur les communautés locales et de conflits sociaux augmente avec la demande en ressources, explique Raymond C. Offenheiser, président d’Oxfam Amérique.  «Les communautés réclament le droit de faire davantage entendre leur voix dans l’exploitation de leurs ressources naturelles, et les entreprises reconnaissent l’intérêt économique d’un engagement significatif en la matière. Mais ces dernières doivent renforcer leurs politiques de dialogue avec les communautés afin de protéger les droits humains des populations locales et d’éviter les effets négatifs. » 

Oxfam définit le consentement libre, préalable et éclairé (CLPE) comme le principe selon lequel les peuples autochtones et les communautés locales doivent être correctement informés, en temps voulu, sans contrainte ni manipulation, des projets qui concernent leurs terres, et doivent pouvoir approuver ou rejeter un projet avant le début des opérations.

Bien que de nombreuses entreprises aient renforcé leur engagement d’appliquer ce principe et de respecter les droits humains au cours des dernières années, il reste encore beaucoup à faire pour protéger les droits des membres des communautés touchées. Dans son rapport, Oxfam formule des recommandations à l’intention de l’industrie et des gouvernements : les entreprises qui ne l’ont pas encore fait doivent adopter une politique d’engagement explicite et sans ambiguïté en faveur du CLPE et élaborer des directives de mise en œuvre accessibles au public. Toutes les entreprises devraient effectuer un suivi-évaluation complet des processus mis en place pour assurer le respect du CLPE. Les entreprises doivent également reconnaître les effets des projets pétroliers, gaziers et miniers sur les femmes en particulier et veiller à se doter de politiques visant à améliorer le dialogue avec celles-ci et à prévenir les effets négatifs qu’elles pourraient subir.

Oxfam recommande que toutes les communautés locales risquant d’être confrontées à  susceptibles de subir des répercussions négatives de projets miniers, pétroliers et gaziers puissent accéder à toutes les informations utiles, participer efficacement à l’évaluation de l’impact et aux négociations, et accepter ou refuser un projet.

Voici les principaux résultats de l’étude : 

  • Quatorze entreprises se sont engagées publiquement à respecter le principe du CLPE.
  • Aucune entreprise ne s’est engagée sans équivoque à se retirer d’un projet si une communauté refuse son consentement.
  • Aucune des entreprises examinées dans le cadre de cette étude ne s’est engagée publiquement à respecter le droit au CLPE de toutes les communautés concernées par leurs projets, y compris les populations non autochtones.
  • Les entreprises du secteur pétrolier et gazier ont un retard considérable sur les compagnies minières dans ce domaine : aucune ne s’est engagée publiquement à respecter le droit au CLPE.
  • La majorité des entreprises étudiées se soucient peu des droits des femmes. Sur les 38 entreprises prises en compte dans de ce rapport, la plupart abordent à peine la question du genre (ou l’importance de dialoguer avec les femmes) dans les documents accessibles au public énonçant leurs politiques ou principes directeurs. 

« Les entreprises doivent absolument respecter le droit de toute communauté touchée d’être informée des projets d’exploitation et d’avoir la possibilité de participer aux décisions qui les concernent, insiste Raymond Offenheiser. Les processus d’application du principe de CLPE permettront de protéger les droits humains et de réduire les risques de conflit social. » 

Le CLPE constitue un outil précieux de gestion des risques pour les entreprises extractives. Obtenir le consentement libre et éclairé des communautés en amont des projets, évite les coûts élevés engendrés par des tensions et des conflits ultérieurs. Dans une étude récente, l’Initiative pour la responsabilité sociale des entreprises (Corporate Social Responsibility Initiative, CSRI) de la Harvard Kennedy School, aux États-Unis, et le Centre pour la responsabilité sociale dans le secteur minier (Centre for Social Responsibility in Mining, CSRM) du Sustainable Minerals Institute à l’université de Queensland, en Australie, ont calculé estimé que les retards de production accusés par un projet international d’extraction minière en raison d’un conflit social, risquent de représenter une perte d’environ 20 millions de dollars américains par semaine.

Notes aux rédactions

Le rapport est disponible dans son intégralité à l’adresse suivante : Community Consent Index 2015

Contact

Alex Blair, à Washington D.C. - 001 202 777 2929 / ablair@oxfamamerica.org

Suivez nos dernières informations avec @Oxfam_fr.